Des soucis à se faire?
Dans sa séance du 22 mai dernier, le Parlement a accepté, par 33 voix contre 21, une initiative parlementaire visant à faire participer les employés de l’Etat au financement de l’Assurance perte de gains (APG). Un essai transformé par les pourfendeurs de la fonction publique après quelques tentatives infructueuses depuis le début de la législature. Pourtant, le fonctionnement de l’APG jurassienne était le fruit d’un accord entre partenaires sociaux.
On pouvait espérer mieux. De nombreux députés avaient appelé à voter non à l’initiative pour des salaires décents en février-mars, en utilisant comme premier argument que cette initiative constituerait «une menace contre le partenariat social». Or, précisément, l’APG véritable actuellement en vigueur, en lieu et place de l’«auto-assurance » de l’Etat, était le fruit d’une négociation entre partenaires sociaux. Le Gouvernement a bien essayé de le rappeler le 22 mai. Rien à faire. Manifestement, les vertus du partenariat social sont à géométrie variable pour quelques députés.
Nous n’allons pas refaire tout l’historique de l’affaire. Nous vous renvoyons à l’Educateur n°1 de 2012 pour cela. Ce qui est inquiétant dans ce vote est que des dispositions négociées parfois âprement avec le Gouvernement, toujours avec à la clé des concessions faites sur d’autres points par les syndicats, risquent d’être acceptées dans un premier temps par le législatif pour être finalement modifiées deux à trois ans après leur entrée en vigueur. Bien évidemment, ce sont les mesures pouvant paraître favorables aux employés qui sont remises en cause. Les contreparties acceptées par les syndicats ne sont pas modifiées.
La décision du 22 mai est inquiétante sur ce point. Elle ne l’est pas d’un point de vue financier pour les employés. Au contraire même, selon nos informations. L’accord passé, au moment de l’adoption de la loi sur le personnel en 2010, prévoyait que les employés participeraient au financement de l’APG dès que les primes de celle-ci coûteraient davantage à l’Etat que son «auto-assurance ». Or, la sinistralité ayant été importante pour le premier contrat d’une durée de trois ans, une participation conséquente allait être demandée aux employés dès 2014. Elle sera sans doute moins conséquente puisque l’initiative parlementaire demande que l’on introduise progressivement un taux de participation pour les employés pour atteindre à terme 50%. Nous demanderons au Gouvernement de respecter rigoureusement cette volonté parlementaire.
Il n’est pas possible de conclure des conventions collectives de travail dans le secteur public. Cela se fait à travers des textes légaux dans lesquels les accords passés entre partenaires sociaux, on le voit, peuvent être réduits à néant par un autre acteur qui se moque des négociations auxquelles il n’a pas participé. Ce mépris du partenariat social pourrait avoir des conséquences importantes sur des dossiers en cours.
Dans le cadre de la révision fondamentale de la loi sur la Caisse de pensions (CPJU), les syndicats, dans un premier temps, s’opposaient au passage à la primauté des cotisations. Puis, en négociant, il est apparu que le maintien de la primauté des prestations était problématique. Les pertes de 2008, puis de 2011, creusaient un trou trop important pour pouvoir répondre aux exigences de la loi fédérale sans changer de primauté. Le rapport entre assurés et pensionnés est de plus en plus faible. Les départs en retraite annoncés vont encore accentuer ce phénomène. Bien sûr, et il faudra le rappeler sans cesse, les assurés ne sont en rien responsables des placements hasardeux réalisés avec leurs avoirs. Mais cela ne change rien. A l’appui d’un avis de droit demandé par les syndicats, on ne peut que regretter les errements des boursicoteurs, pas seulement à la CPJU, d’ailleurs. Par contre, on ne peut accepter que les assurés soient les seuls à payer des fautes qu’ils n’ont pas commises. Dans le projet de loi sur la CPJU, les assurés vont faire de grands efforts. En contrepartie, des mesures d’accompagnement pour les plus âgés ont été acceptées par le Gouvernement. On ne peut qu’espérer que le résultat de ce partenariat ne sera pas remis en cause par le législateur.
De même, et cela entre dans les négociations, le décret sur les traitements est de nature à quelque peu atténuer, pendant la vie active, les effets des pertes sur les pensions. Le Parlement sera bientôt saisi du dossier. Nous y reviendrons alors plus en détail. Nous nous faisons du souci quant au respect du partenariat social par le législatif, mais nous continuons de croire aux vertus de ce partenariat, et pas seulement en fonction des circonstances.
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