VD : Les parents, parlons-en ! - 01/2024

VD : Les parents, parlons-en !

Il n’est pas rare dans les salles des maitre·sses d’entendre les difficultés relationnelles entre les familles et l’institution scolaire. Parfois les situations sont lourdes et épuisantes. Parfois, l’image qui émerge des tableaux décrits conduit à noircir nos pensées. Pour ce premier numéro de 2024, j’ai voulu savoir ce que les parents avaient dire à propos d’école. Que disent-ils, ces parents, de notre travail ? Que pensent-ils de l’école ?

 

 

Je pensais que mon enquête allait me conduire vers des plaintes, des propos négatifs. Le portrait est tout autre. Si vous n’avez pas le moral, si vous êtes dans l’incertitude concernant la qualité de votre travail, les deux témoignages ci-dessous sont pour vous. Ils racontent deux expériences vécues du point de vue des familles.

 

On ne m’a jamais dit « Débrouillez-vous ! »

 

Solange est coiffeuse. Elle a deux enfants en 7P et 8P. « On m’avait beaucoup dit qu’à l’école ce serait compliqué, que les enfants ne sont pas aidés, pas soutenus, bref que c’était la galère ». Lorsque Lilou est entrée à l’école, Solange était pleine d’inquiétude et ses craintes se sont avérées dès la 1P. Sa fille a été victime d’une sorte de racket. Un chantage au gouter. En résumé, si elle donnait sa récré, alors elle avait le « droit » d’aller jouer avec les autres. Solange en a parlé et les enseignantes se sont montrées tout à fait à l’écoute. Elles ont résolu le problème. « Toutes mes appréhensions ont été gommées. » Les deux premières années de la scolarité de son fils ont été plus difficiles, marquées par le peu de compréhension des enseignantes dans les situations conflictuelles des enfants. Marco s’est trouvé accusé sans preuve dans plusieurs d’entre elles. En 3-4, Marco a eu « deux profs géniales qui ont mis en place tous les ajustements qui convenaient » ( Marco est diagnostiqué TDAH ). « On m’a dit que mon enfant avait besoin de bouger, alors ils lui ont donné des assises particulières, des objets à manipuler. Ils ont mis en place des réseaux. »

Pour cette maman, l’école se résumait à l’enseignement des matières, comme la géographie, les maths. Elle ne pensait pas que « l’école viendrait avec des solutions. On ne m’a jamais dit : ébrouillez-vous avec votre enfant ». Solange raconte que les enseignant·es se sont déplacé·es ; l’ont écoutée ( parfois les entretiens ont duré deux heures ) ; ont mis en place des réseaux ; ont proposé de l’ergothérapie, des cartables informatiques. Son rôle : celui d’une maman. Elle suit et soutient ses enfants pour les devoirs. « Et puis il y a l’éducation : je contrôle qu’ils aient pris leur récré ; qu’ils aient leurs affaires pour la journée ; qu’ils soient propres. »

Chaque enseignant·e a son caractère, sa façon de parler. Toutefois, Solange indique qu’elle ne changerait rien au système. Tout est fait pour que les enfants « soient accompagnés jusqu’au bout et qu’ils soient à la bonne place ».

 

Les parents délèguent l’éducation à l’école

 

La famille de Mélanie vit sur la côte, dans un petit village surplombant le lac. Un endroit calme. Ils ont deux enfants en 3 et 6P. L’école a eu un impact assez important sur les enfants. Mélanie parle de grands changements, notamment sur sa fille cadette qui a beaucoup pleuré en 1P. « Elle s’est sentie délaissée. Quand on a vingt enfants à gérer, on a moins de temps à consacrer à chacun. » Aujourd’hui la situation est apaisée. Toutefois Mélanie parle de l’influence des pair·es sur le comportement et le langage de ses enfants. « Beaucoup de parents délèguent l’éducation des enfants à l’école ; ils ne fixent pas de limites. ». Dans la cour de l’école, on peut voir des enfants énervé·es, qui jurent. « Ils sont considérés comme des petits adultes. ».

Mélanie pense que les enseignants et enseignantes sont courageux. Elle craignait des personnes blasées par leur métier.

En fait, « beaucoup ont un mental d’acier ». Les enseignantes de ses enfants sont passionnées, dit-elle. Dans la classe de son ainé, il y a environ six enfants sur vingt-quatre qui ont des besoins particuliers. Mélanie questionne ce fait. « Autrefois, il n’existait pas tous ces aménagements, on était mélangé aux autres. » « Aujourd’hui, on regroupe des enfants par niveau pour qu’ils soient au meilleur de leurs capacités, mais on leur facilite peut-être un peu trop les choses. » Qu’adviendra-t-il plus tard ? Dans la vie, ce n’est pas comme ça. On le comprend, on touche ici aux enjeux liés à l’inclusion. Beaucoup de moyens sont investis pour inclure tous les élèves. « On crée des petits chaussons » pour que tout le monde réussisse. Or, semble dire Mélanie, la vraie vie est différente et l’on peut questionner ce qu’il adviendra de ces enfants lorsqu’ils et elles y seront confronté·es.

Comment conçoit-elle son rôle de parents vis-à-vis de l’école ? Avant l’entrée à l’école, Mélanie a vu d’autres parents qui « étaient au taquet », apprenant à leurs enfants des éléments du programme scolaire. « Ils ont la pression. Quand leur enfant ramène un A au lieu d’un AA, ils ne sont pas contents. » Mélanie ne laisse toutefois pas ses enfants sans aide si elle pense qu’ils en ont besoin. « L’enseignante de mon fils nous a dit au début de l’année que les enfants devaient être capables de faire leurs devoirs de manière totalement autonome, mais Maxime a ramené un 3,5 en conjugaison. Il ne sait pas s’autogérer. Il se contente de faire ce qu’on lui a dit à l’école. » Ainsi, Mélanie indique que désormais elle intervient pour l’aider à apprendre, ce qui parfois génère des tensions. « Il préfère jouer aux jeux vidéo. »

Les enfants ? « Ils sont toujours hypercontents d’aller à l’école ». Durant les deux premières années de scolarité, Mélanie raconte qu’elle trouvait qu’ils jouaient beaucoup. Elle pensait qu’ils n’apprenaient pas. En fait, dit-elle, il n’en était rien. Sa fille, actuellement en 3P, a décroché la lecture. Elle est désormais capable de lire de petits albums. 

 

Sandrine Breithaupt

 

Voir aussi Les familles et l'école: si proches mais si loin, Educateur 4/2022

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