Beaucoup de familles vivent parfois des moments d’angoisse lorsque la rentrée se rapproche et qu’une solution de garde des enfants n’est toujours pas trouvée. Bien des entreprises souhaiteraient plus de souplesse d’engagement pour leurs collaboratrices et collaborateurs. Cela se comprend. Comme beaucoup d’autres, Neuchâtel cherche lui aussi à se doter de structures d’école « à journée continue ».

Ces dernières années, toutes les communes ont développé leur offre d’accueil parascolaire. Problème : ce système « à la carte » est parfois compliqué et son pilotage n’est pas unifié, avec une tendance à la dispersion des responsabilités. Le projet MAÉ, lui, vise à unifier les différents prestataires dans une organisation unique. Cela devrait permettre une simplification pour les parents et une meilleure efficience pour les autorités.

Toutefois, si ce système est rentré dans les mœurs dans bien des pays, et s’il tend à se répandre en Suisse aussi, il provoque une rupture dans nos habitudes familiales. Quatre projets sont à l’étude dans notre canton, et la question du prix se pose déjà, ainsi que celle de la liberté de choix. MAÉ doit-elle être obligatoire ou facultative ?

L’école doit s’intéresser de près à ces réflexions. En effet, MAÉ aura des incidences sur les horaires scolaires, sur l’organisation des devoirs et du soutien pédagogique, sur l’utilisation des salles spéciales et des cours de nos collèges. Pour réussir, il est nécessaire que ce projet soit porté par les structures d’accueil existantes bien sûr, mais aussi par l’école en général, par les sociétés sportives, musicales, culturelles, ainsi que par les parents. Il faudra veiller à ce que les entreprises privées favorisées participent à son financement. Le champ des possibles est vaste et enthousiasmant, à condition … que l’on s’en donne les moyens.

En effet, les défis sont nombreux. Qui va investir les sommes nécessaires à créer les infrastructures, à engager et à former suffisamment de personnel qualifié ? Les différents services communaux concernés seront-ils d’accord de travailler main dans la main ? Le monde politique résistera-il à l’éternelle tentation du « bricolage » et des demi-solutions ?

Les besoins des enfants doivent absolument avoir la priorité. MAÉ sera une réussite si elle offre à chacun·e des possibilités d’épanouissement adaptées, des lieux de rêve, de créativité, de repos, de défoulement. Il serait triste que le manque de moyens rende nécessaire un cadre disciplinaire étouffant. Pour grandir, il faut avoir de la liberté, ce que la vie scolaire n’offre pas toujours.

Ce projet est un défi passionnant. Le SAEN y sera très attentif, en portant la voix des enseignant·es avec un regard constructif mais critique. Si les enfants sont pris·es en charge toute la journée, que ce soit dans un vrai respect de leurs besoins et de leurs différences.

Et ceci ne doit pas nous faire perdre de vue que la famille est un pilier de notre société, qu’une vraie politique d’encouragement et de soutien y est encore à construire dans notre pays, en libérant les parents certains jours de la semaine, mais aussi en permettant à toutes et tous de consacrer suffisamment d’énergie à leur tâche éducative essentielle.

MAÉ ne remplacera pas la famille, mais devra la renforcer ! •

Pierre-Alain Porret, président du SAEN