Plein écran - 7/2022

Plein écran

L'enfance, l'amour et la musique au cinéma

Invitations offertes !

10 invit' offertes respectivement pour La Dégustation, Avec amour et acharnement (Frenetic-Film); 5 invit' pour Ennio (Filmcoopi), Pat et Mat au jardin  (Outside-the-box).

Expédier nom, prénom et adresse postale à secretariat@revue-educateur.net en indiquant l'objet du désir.

 

 

 

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Le film de la rentrée pour les enfants: inventif et burlesque !

En villégiature dans leur maison à la campagne , les inséparables Pat et Mat rivalisent d'inventivité pour transformer leur quotidien en un vaste chantier de maladresses surmontées avec leur optimisme légendaire comme trouver la parade à un jeu de dames détruit par un arbre, se protéger du soleil avec un parasol récalcitrant,  installer un cactus menaçant,  dompter une piscine gonflable, recycler des assiettes après leur barbecue, construire un presse-agrumes pour se désaltérer après cette journée si intense. Six courts films emblématiques de de la maestria tchèque en matière d'animation burlesque.

Pat et Mat au jardin, Marek Beneš, 2018, République tchèque. Aux cinémas dès le 31 aout.

 

 

2

 

Deux hommes et le désir d'une femme

Adapté du roman Un Tournant de la vie de Christine Angot qui a participé à l'écriture du film avec Claire Denis, sa réalisatrice, ce mélodrame percutant commence avec des scènes de complicité sensuelle entre deux quinqua, Sara et Jean, au bord de mer. On les retrouve en hiver à Paris dans leur appartement où ils filent le parfait amour depuis neuf ans. Sara (Juliette Binoche), animatrice d'une émission sur RFI (Radio France Internationale), donne la parole à des gens d'ailleurs qui témoignent de leur vie difficile. De Jean (Vincent Lindon), on apprend par petites touches qu'il fut rugbyman et fit de la prison. Son fils Marcus, d'un précédent mariage, vit chez sa grand-mère à Vitry en banlieue et trimballe ses quinze ans sur une mauvaise pente. De Sara, on sait peu de choses. Sauf qu'elle fut l'amante de François (Grégoire Colin) qui lui avait présenté son ami Jean il y a dix ans. Quand Sara croise par hasard François dans la rue, le passé lui revient brutalement. L'amour subsiste toujours un peu, même longtemps après une séparation. Dans le même temps, François propose à Jean de rejoindre son agence de jeunes talents sportifs. Jean hésite, mais a besoin de travailler. La caméra de Claire Denis ne juge pas, mais se rapproche de plus en plus de l'intériorité de Sara avec compassion. Sara revoit François à son agence où Jean n'est jamais loin. Hypersensible, Jean ressent une distance avec sa compagne. Sara se laisse vivre ce passé qui revient sans rien prévoir. Pour François et Jean, leur réaction est commune, la rage forcément contre Sara la rebelle qui refuse de s'abandonner à quiconque, sinon à son propre désir. Le sentiment d'amour mis à nu, en cadrages très rapprochés, en un montage sec et de plus en plus haletant, avec une musique de Stuart Staples qui est le titre du film en anglais, Both sides of the blade. Sara sur le fil du rasoir. Ours d'Argent de la Meilleure mise en scène, Berlin 2022.

Avec amour et acharnement, Claire Denis, France, 2022. Aux cinémas dès le 31 aout.

 

 

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Un enfant, entre poésie et drame social

Téhéran, le jour de la rentrée dans une classe d'école primaire, l'institutrice demande à chaque élève le métier du père : mécanicien, policier, porteur, boulanger, épicier, au chômage … Chacun devra offrir à tous les autres qui un fruit, qui un gâteau qui du lait, en lien avec la lettre de l'alphabet du jour. Avec son père vendeur de pommes, Saeed devra apporter trente reinettes le jour du P comme pomme. Saeed a récolté, avec son père Morteza, des kilos de pommes dans un verger avant de les vendre dans les rues de la capitale iranienne à l'aide de leur mégaphone. Le réalisateur a choisi des acteurs non professionnels et s'est inspiré de leurs conditions de vie pour ce scénario des plus limpides. La famille de Saeed provient de la campagne et a migré à Téhéran par nécessité économique. Une famille soudée et optimiste jusqu'au jour où la camionnette du père est dérobée. Difficile alors de subsister avec les seuls gains des énormes lessives exécutées par la mère, Mahboubeh, pour le compte de familles plus aisées. Morteza songe à repartir au village, mais la mère privilégie la scolarité de ses deux enfants, mieux garantie en ville. Le réalisateur pose un regard sans misérabilisme. Au contraire, un regard modeste de tendresse et d'amour prévaut dans cette nouvelle pépite du néo-réalisme à l'iranienne. Film à (ac)cueillir dans toute sa splendeur !

The Apple day, Mahmoud Ghaffari, Iran, 2022. Aux cinémas dès le 7 septembre.

 

 

4

 

Une comédie romantique épicée comme un Château Margaux

Après avoir joué 300 représentations de la pièce La Dégustation devant 150'000 spectateurs et remporté le Molière de la Meilleure comédie, les deux comédien·nes principaux Isabelle Carré et Bernard Campan proposent au dramaturge et cinéaste Ivan Calbérac de la transposer à l'écran. Tournée en partie à Troyes près de la cathédrale, cette intrigue prend corps dans au Cellier de St-Pierre que dirige le caviste Jacques. Son rapport au vin est plutôt destructeur. Il boit du vin de très haute qualité pour se couper de ses tourments. Bourru et solitaire, Jacques doit cesser de lever le coude après plusieurs malaises alarmants. Grâce au vin, Hortense, victime d'une éducation catho et stricte, fend la cuirasse du surmoi et libère sa sensualité. La dive bouteille sera, du moins au début de leur rencontre, le langage commun de ces deux cabossés de la vie. L'excellente mise en scène est servie par des dialogues ciselés et réalistes et une photographie chaude et en Scope. Une comédie romantique et bien ancrée dans son époque avec des seconds rôles essentiels et attachants qui incarnent des SDF aidés par Hortense ou un jeune d'un foyer placé en insertion professionnelle chez Jacques. Une comédie réaliste qui se laisse déguster avec un immense plaisir.

La Dégustation, Ivan Calbérac, France, 2022. Aux cinémas dès le 07 septembre.

 

 

3

 

Ennio Morricone, le musicien le plus aimé du XXe siècle

Le cinéaste Giuseppe Tornare a conçu ce portrait du compositeur italien Morricone, avec lequel il a dix films en trente ans d'amitié, comme un spectacle total. Un résultat épique pour immerger le spectateur dans l'œuvre d'une vie riche de plus de cinq-cents bandes originales de films en 70 ans, dont septante musiques de films primées et deux Oscars. Images d'archives, extraits de films, fragments de vie privée du compositeur, captations de ses tournées mondiales, entretien avec Il Maestro peu de temps avant sa disparition, témoignages de cinéastes et de compositeurs, tout s'enchevêtre avec un art du rythme comme un composition musicale inspirée et romanesque. "Morricone sera devenue la bande originale de millions de gens", selon le grand Quincy Jones. Pourtant Ennio se vouait à la médecine mais son père, trompettiste, l'a obligé dans cette voie musicale. L'entretien de Tornare avec Ennio révèle des facettes peu connues de ce compositeur qui aura imposé un langage selon Clint Eastwood. Morricone se sentait coupable envers l'Académie italienne de musique d'avoir composé la musique de films, considérée alors comme de la prostitution. De fait, Ennio était un passionné de musique expérimentale et "a réussi à faire converger la musique absolue et la musique de film", selon ses propres dires. En sortant de ce film, qui n'aura pas envie de revoir certains films ? La liste est longue etpour ne citer que quelques-uns : La Mission de Joffé, Le Clan des Siciliens de Verneuil, Les Poings dans les poches de Bellochio, les westerns de Sergio Leone, Saco et Vanzetti avec l'inoubliable Here's to you de Joan Baez. "Sa musique crée un monde qu'on ne voit pas à l'écran" aimait à dire le cinéaste Joffé. Simple et accessible, Ennio Morricone a inspiré autant des compositeurs chevronnés tels John Williams et Hans Zimmer que des musiciens rock comme Radiohead, Metallica ou Bruce Springsteen. Simple, accessible et élégant, Ennio a rendu hommage à son épouse Maria qui fut sa muse et sa première auditrice.

EnnioGiuseppe Tornare, Italie, 2022. Aux cinémas dès le 21 septembre.

 

 

 

Entretien téléphonique avec Lionel Baier (ancien responsable du département cinéma de l’ECAL), réalisateur de La Dérive des continents (au sud).

 

Vu le sujet du film (L’UE et les réfugiés), avez-vous rencontré des difficultés pour financer votre film ?

Oui, ce fut compliqué d’expliquer le projet et de convaincre les producteurs rebutés par ce traitement comique. Ils auraient préféré un vrai drame. À mes yeux, l’humour ne signifie pas forcément légèreté. C’est plutôt une sorte de contrechamp, l’angle mort de la réalité.

 

Dans la plupart de vos films, encore plus dans celui-ci, vous multipliez les séquences joyeuses quasi burlesques.

Enfant, j’ai été nourri aux comédies de Chaplin, De Funès, du cinéma italien. Des films qui abordaient des sujets très politiques avec humour et gravité. Je crains toujours de donner des leçons. Alors, avec l’humour, je crée de la complicité avec le spectateur.

 

La jeune Camerounaise qui harangue les manifestants pro-réfugiés à la fin du film m’a fait penser au discours final de Chaplin dans Le Dictateur.

Elisabeth Owona était d’accord de participer au tournage à condition qu’elle puisse exprimer ses revendications. J’ai donc ajouté cette scène pas prévue au scénario initial. Une scène essentielle tant elle remet les pendules à l’heure.

 

L’acteur Tom Villa dans le rôle du conseiller de Macron est irrésistible. Comment donne-t-on vie à un tel personnage ?

Les sorties de Charlan (personnage incarné par Tom Villa) sont basées sur mes observations à la télé de l’ancien porte-parole de Macron, Gabriel Attal. Macron est entouré de trentenaires sans empathie aucune, hors-sol et capables d’une telle violence dans leurs propos. Le récent discours de Macron sur la fin de l’abondance et de l’insouciance est le parfait exemple de ce violent cynisme.

 

Autre personnage savoureux, Albert, joué par Théodore Pellerin, est extraordinaire dans ce rôle du fils traversé de sentiments contradictoires envers sa mère.

Ce personnage m’est très proche. À 18 ans, j’étais aussi très intransigeant et extrémiste. Plus âgé, on devient plus raisonnable mais sans forcément avoir davantage raison que les plus jeunes ! C’est ensemble que l’on peut tendre vers des réponses justes.

 

De nombreuses scènes de votre film sont silencieuses comme en suspens.

Avec ces respirations, le spectateur trouve sa place dans le film. Ces silences révèlent l’état de dépassement dans lequel sont placés les personnages du film. Ils sont au centre de ce mouvement des plaques tectoniques tant au niveau des continents que de leurs sentiments. Ces deux corps, Nathalie et Albert, forment une petite ile. Ils se perdent, cherchent à remplir leurs failles puis se retrouvent.

 

À plusieurs reprises, un réfugié à bicyclette apparait en arrière-plan dans des scènes.

Les réfugiés apparaissent surtout dans leurs conditions de victimes ou d’exploités dans les maraichages. Sinon, ils sont invisibles. Je tenais à les faire exister dans des activités autres.

 

Un message pour le public enseignant ?

27 avant-premières du film sont prévues prochainement dans les cinémas de Suisse romande. Je suis très curieux de voir comment les spectateurs vont approprier le film et créer du sens. Je conçois mes films en laissant la possibilité au spectateur d’en être auteur. Je souhaiterais infiniment que l’école consacre davantage de temps à la lecture de l’image, qu’une vraie formation soit instaurée à tous les degrés scolaires. Comprendre très tôt ce qu’est une image, sa différence avec la réalité, contribuerait à un public plus averti.

 

SUR LA PAGE WEB

5 invit' offertes respectivement pour  Tori et Lokita (Xenix-Films), Garçonnières (Agora-Films). Expédier nom, prénom et adresse postale à secretariat@revue-educateur.net en indiquant lobjet du désir.

 

L’amitié indéfectible de deux enfants exilés

Mineurs non accompagnés, Tori, réfugié béninois à peine sorti de l’enfance, Lorika, jeune ado camerounaise et sans papiers, opposent aux lois de la jungle capitaliste leur amitié de frère et sœur à la vie à la mort. Les frères Dardenne explorent depuis La Promesse, le film qui les a révélés en1996, des trajectoires d’adolescent.e.s issu.e.s du quart-monde ou du tiers-monde en butte à l’indifférence ou l’exploitation ambiante. Les deux réalisateurs belges n’ont pas leurs pareils pour donner à voir de manière quasi clinique les gestes du quotidien et les mouvements de ces corps d’enfant soumis aux intérêts des adultes les plus matérialistes et vils. Tori et Lokita résistent avec leur force d’innocence et de solidarité. Ce film au suspense haletant (Tori va-t-il sauver Lokita de son enfermement entre dealers et passeurs mafieux?) est ponctué de cette tendresse qui rend d’autant plus révoltante l’injustice qui accable ces enfants qui souhaitent juste grandir, rêver et aimer. Juste et puissant. Prix du 75e anniversaire, Festival de Cannes 2022.

Tori et Lokita, Jean-Pierre et Luc Dardenne, Belgique, 2022. Aux cinémas dès le 05.10.2022.

 

Ls hommes en quête d’une nouvelle et inspirante masculinité

Ethnologue, réalisatrice, célibataire sans enfants et féministe affirmée, Céline Pernet, 35 ans, a ressenti, après moult échecs amoureux et aventures sans lendemain sur les sites de rencontres, le besoin d’un dialogue sincère avec des hommes. Elle poste une annonce sur les réseaux sociaux à laquelle répondent plus de cinquante inconnus (de 30 à 45 ans), désireux d’échanger avec elle sur tous les sujets sans tabou aucun, la drague, la première fois, leur bite, leur couple, leur paternité, l’homosexualité et le sens d’être un homme aujourd’hui. Munie de sa seule caméra, sans équipe de tournage, elle s’invite chez chacun sans casting préalable. C’est au montage que le choix final s’est imposé. Pour introduire chaque thème de discussion avec eux, la cinéaste nyonnaise se met en scène et part de ses expériences et de ses préjugés. Les trente paroles masculines sont directes, sincères et profondes. Tous refusent la partition écrite d’avance la normalité sociale. Ces hommes aspirent à faire entendre une autre petite musique, à libérer une autre parole masculine. Le défi est relevé avec maestria. Les féministes le clament haut et fort : il ne suffit plus de protéger les filles mais d’éduquer autrement les garçons. Garçonnières ouvre la voi(x)e.

Garçonnières, Céline Pernet, Suisse, 2022. Aux cinémas dès le 21.09.2022.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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