Pages ouvertes - 07/2021

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Conception universelle de l’apprentissage: penser la diversité dans son enseignement

 

Bancs alignés, élèves identiques en position d’écoute, enseignant·e déclamant le savoir, tableau noir scrupuleusement rempli de règles grammaticales … la vision est surannée, bien heureusement ! Il est certain qu’un égalitarisme face au défi d’apprendre est illusoire. Les politiques intégratives, faisant suite aux avancées scientifiques et aux pratiques pédagogiques attentives, ont par ailleurs fini d’achever cette vision archaïque de « l’élève normal·e » en mettant en évidence que les mesures mises en œuvre pour les enfants à besoins éducatifs particuliers trouvent souvent un écho favorable auprès des autres élèves de la classe. C’est cette réalité plurielle des élèves que le modèle de conception universelle de l’apprentissage souhaite expliquer.

Issue du monde de l’architecture visant à créer des espaces accessibles à chacun·e ( p. ex. une rampe d’accès est adaptée aux fauteuils roulants et poussettes, mais aussi aux personnes sans difficulté pour marcher ), la conception universelle invite à la flexibilité des usages, à la simplicité d’accès ou encore à la tolérance à l’erreur. Une autre discipline s’est attribué ce concept : le design. Les exemples phares sont les portes ou les robinets qui, grâce à leur ergonomie, peuvent être utilisés par un plus ou moins grand nombre de personnes.

Ces disciplines se construisent donc sur l’anticipation de la diversité des besoins des utilisateurs et utilisatrices, et tentent, autant que faire se peut, d’intégrer chacune et chacun dès la conception.


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Absorbée ensuite par le monde de l’éducation, elle devient la conception universelle de l’apprentissage ( CUA ) et propose de concevoir des environnements pédagogiques variés pour permettre à toutes et tous les élèves ou presque de trouver le moyen d’apprendre. Cette diversité permet en outre de favoriser d’autres modes d’expression de la pensée que ceux qui imprègnent généralement la culture scolaire.

Pour citer un exemple d’une démarche fondée sur la diversification du matériel éducatif, l’apprentissage de la commutativité pourrait bénéficier des médiations suivantes : aide d’une vidéo, d’une comptine, d’un poster de groupe, à usage distinct ou combiné, ou toute autre initiative complémentaire aux types d’interventions dominantes telles que l’explication verbale ou le papier-crayon. Il convient néanmoins de garder bien visibles ( 1 ) pour l’élève le sens de l’activité scolaire et ( 2 ) pour l’enseignant·e son rôle primordial d’accompagner l’élève vers la connaissance.

Le présent article a pour but de donner quelques premières pistes pour s’approprier la CUA et penser sa mise en œuvre dans différents contextes de classe, en tenant compte des contraintes institutionnelles, des opportunités induites par le numérique, ou encore des enjeux de culture d’établissement.

Le modèle de CUA est volontairement simple, mais ses conséquences peuvent être importantes. Le phénomène d’apprentissage y est résumé en trois éléments constitutifs proches des compréhensions actuelles issues des sciences cognitives : l’engagement, la représentation, l’action/expression. Ces trois constituants s’acquièrent en trois niveaux : accéder, construire, puis internaliser.

Par exemple, en tant qu’apprenant·e, je fais fortuitement l’expérience d’engagement actif ( accéder ) dans l’apprentissage parce que la situation proposée par l’enseignant·e est stimulante. Puis, je développe des stratégies pour entrer et rester dans un engagement actif ( construire ) pour enfin exploiter ces stratégies dans mon quotidien ( internaliser ). Ainsi, alors que la mission de l’enseignant·e est d’offrir un environnement d’apprentissage varié et multiple, celle de l’élève est de gagner en autonomie dans l’apprentissage. Le tableau ci-contre explicite ces composantes et les illustre.

Plusieurs définitions de la CUA existent : « intégration de la flexibilité dans le curriculum lors de la planification, pour que toutes et tous puissent accéder à une variété de solutions d’apprentissage » ( Cast.org, 2020, traduction libre ) ; « prise en compte des différences de tous les élèves dans une perspective de dénormalisation » ( Bergeron et al., 2011, p. 93 ) ; ou encore « cadre pour penser l’inclusion de tous les élèves à l’école » ( Kennedy et al., 2018, p. 671, traduction libre ). Quoi qu’il en soit, s’engager dans la CUA est synonyme d’accepter la pluralité et la diversité comme norme.

La CUA invite à maintenir un enseignement par objectif et reste donc dans une pédagogique structurée par l’enseignant·e. Murawski et Scott affirment que « l’enseignant·e doit fournir un objectif clair d’apprentissage, puis travailler avec les élèves pour sélectionner les manières d’apprendre, de s’engager, et de démontrer la maîtrise de l’objectif » ( 2019, p. 5, traduction libre ). Ensuite, la CUA ne donnerait pas plus de travail à l’enseignant·e, mais le déplacerait significativement dans l’anticipation. Ainsi, les environnements flexibles sont des exemples qui s’apparentent quelque peu à ce qu’une classe orientée par la CUA pourrait être. L’environnement est riche et pluriel, l’enseignant·e a mis à disposition une diversité de médiations orientées par des objectifs d’apprentissage explicités, puis l’élève fait son choix dans un cadre large et dans une exigence clarifiée. Il y a une sorte de responsabilité d’apprendre qui est rendue à l’élève, alors que la responsabilité de créer l’environnement stimulant est maintenue auprès de l’enseignant·e. En simple, l’enseignant·e pourrait dire aux élèves : vous devez vous débrouiller pour me montrer que vous avez appris ceci et pour ce faire, vous avez toutes ces options-là à disposition.

En conclusion, embrasser les perspectives de la CUA c’est :

• Accepter pleinement la diversité humaine et la pluralité des enjeux d’apprentissage.

• Offrir aux élèves une variété d’options d’apprentissage.

• Rendre son enseignement flexible.

• Orienter les élèves sur les options d’apprentissage les plus riches. 

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