La politesse de la langue

La politesse de la langue

Le journal Le Matin Dimanche du 28 août dernier consacrait un long article au niveau d’orthographe préoccupant des jeunes enseignants…

Ce n’est pas la première fois qu’on parle de baisse de niveau en orthographe. C’est un sujet récurrent qui a souvent opposé les tenants des méthodes dites «anciennes» et les défenseurs des nouvelles approches de l’enseignement du français. Un débat pas toujours fécond. On brandit des études plus ou moins scientifiques, des graphiques, on plonge dans ses souvenirs, on s’invective, mus par une certaine émotion. Il y a toujours eu et il y aura toujours des élèves peu doués en orthographe, quelle que soit la méthode utilisée. Reste le constat objectif et implacable: la proportion des élèves, des étudiants, mais aussi des enseignants en proie à des difficultés orthographiques est plus importante que par le passé. Il n’est pas étonnant de voir aujourd’hui les jeunes enseignants pointés du doigt. L’évolution suit son cours.

Depuis plusieurs années, les enseignants de l’école obligatoire et du secondaire II tirent la sonnette d’alarme. Depuis quelque temps, retour aux fondamentaux dans certains départements de l’alma mater. En octobre 2010, une vingtaine d’universités françaises proposaient des cours de rattrapage en orthographe et syntaxe aux étudiants de lettres et de sciences humaines ayant fait le plus de fautes dans une dictée de dix minutes. «Ça ne sert à rien de se lamenter, il faut agir. Depuis quinze ans, c’est une vraie dérive», plaide Patrick Porcheron, vice-président de la meilleure fac scientifique de France. «Si encore ce n’était qu’un problème d’orthographe! Mais cela va bien au-delà: les mots sont employés de travers et les phrases construites sans queue ni tête. Un bêtisier permanent !»*

Les facultés suisses ne sont pas en reste. En 2006 déjà, l’Université de Neuchâtel proposait des cours de grammaire et d’expression écrite à certains étudiants.** Ces anciens étudiants achèvent maintenant leur cursus dans les HEP et font déjà face aux élèves. Est-il encore temps de bachoter les règles d’orthographe? Pourquoi pas. Il n’est jamais trop tard pour apprendre et l’orthographe française est certes difficile. Mais le malaise est palpable. C’est comme si un prof d’auto-école devait réviser les panneaux de signalisation avant que son élève ne prenne les commandes du véhicule. Les causes de cet état de fait sont multiples et variées: diminution de la dotation horaire du français à l’école, nouveaux plans d’études, méthodes moins centrées sur la répétition, sur le drill, influence des SMS, moins de temps consacré à la lecture, etc.

Les remèdes sont sans doute multiples sous la plume des spécialistes en sciences de l’éducation. Personnellement, je n’en vois qu’un pour nos élèves du cycle d’orientation: élaguer les programmes, se concentrer davantage sur les fondamentaux. A quoi bon passer des heures à tenter de faire comprendre l’énoncé ancré, l’énoncé coupé de la situation de communication ou d’autres notions de narratologie à des élèves de fin de scolarité obligatoire qui écrivent «j’avé mal a la tète»; «sont frère été malade» ou qui disent sans rougir «il buva, il néquit» (v. naître)? Nombre d’éditeurs l’ont bien compris. Il suffit de se rendre dans une librairie au début de l’été ou avant la rentrée scolaire. Les collections parascolaires remplissent les étagères: dictées progressives, enrichir son vocabulaire, revoir la conjugaison, l’orthographe, la grammaire.

Les anciens ouvrages – le Bled, la grammaire Grevisse… – trouvent une nouvelle jeunesse, eux qu’on croyait disparus à jamais dans l’abîme du temps. A ce propos, laissons le dernier mot à Victor Hugo: «Je regrette l’Y de l’ancienne orthographe du mot abîme. Car Y était du nombre de ces lettres qui ont un double avantage: indiquer l’étymologie et faire peindre la chose par le mot : ABYME.***»

 

 

* www.leparisien.fr/societe/les-facs-s-attaquent-aux-fautes-dorthographe- 04-10-2010-1094197.php

** http://infrarouge.tsr.ch/ir/100-sekour-orthographe-ecoledesastre# id=427774

*** Victor Hugo, Faits et croyances.

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