Faites du bruit pour le prof!

Faites du bruit pour le prof!

 

La Suisse alémanique voit se multiplier depuis quelque temps des plaintes d’adultes contre les nuisances sonores causées par les enfants dans les lieux publics. Cette situation a motivé les associations de jeunesse d’outre-Sarine à demander au Gouvernement d’établir un droit des enfants à faire du bruit.

Petit pays, petits soucis, diront certains. L’affaire paraît pourtant bien sérieuse. Les plaintes ne cessent de s’accumuler et les collectifs de défense des droits des enfants réclament à cor et à cri un droit des enfants à faire du bruit. Ivica Petrusic, directeur du bureau de contact des associations de jeunesse à Zurich, le dit clairement: «Le bruit des enfants dans les espaces publics doit être protégé, car ils en ont besoin en tant que lieu important d’apprentissage et de développement des compétences sociales.»* Qui a raison? Ceux qui se plaignent du bruit, ceux qui veulent le faire inscrire dans la loi comme un droit? A en juger par les commentaires laissés sur les sites internet des journaux qui ont relayé l’information, le tort reposerait en majeure partie sur «ces bourgeois aigris qui ne supportent plus rien, qui se plaignent de tout et qui veulent étouffer la vie dans l’œuf». En effet, nombreux sont ceux qui défendent les bambins, brandissant le slogan Laissez-les vivre! Pour peu, on croirait revivre certains débats de Mai 68**. C’est une caractéristique des forums sur internet que d’être un peu dans les excès, surtout quand on touche à des sujets de société. Quelques intervenants se montrent toutefois plus modérés et font appel à la responsabilité des parents dans le comportement, l’éducation des jeunes, tout en reconnaissant le besoin naturel qu’ont ces derniers à rire, crier, chanter en plein air. L’Allemagne a vécu ce débat il y a peu. En 2011, le Conseil des ministres allemand a approuvé un projet de loi promulguant le devoir de tolérance vis-à-vis du bruit causé par les enfants dans la rue. Trop de plaintes issues d’une population germanique vieillissante ont poussé les politiques à prendre les devants. On ne pouvait décemment se mettre à ériger des murs antibruit autour de chaque garderie… On comprend aisément la décision du Bundeskabinet allemand. La situation devenait ingérable au niveau des tribunaux, notamment. Mais on peut s’interroger sur la pertinence et l’impact d’un tel article de loi. Nous vivons dans une société qui fait toujours plus appel aux juristes pour régler les comportements humains. Soit. Mais que se passera-t-il, par exemple, quand un enfant se mettra à pousser des ciclées infernales à la caisse d’un magasin? Est-ce que des parents brandiront le code civil pour faire taire les personnes incommodées, au nom du développement des compétences sociales du bambin? Assurément, une telle loi ne doit pas faire l’économie d’une réflexion large sur la place des jeunes dans l’espace public ni sur le rôle éducatif des parents. La réflexion trouvera aussi certainement des points d’ancrage dans le milieu scolaire. Depuis plusieurs années, j’entends mes collègues, surtout ceux qui enseignent en 1CO, se plaindre de l’énergie considérable qu’il faut déployer en début d’année, voire tout au long de l’année, pour canaliser, cadrer des élèves toujours plus dissipés et bavards! Des moulins à paroles! Certes, ce n’est pas nouveau, mais aujourd’hui c’est devenu tellement naturel pour beaucoup d’élèves qu’il est difficile de leur faire entendre raison. Les audacieux tiennent tête et répondent! Et je ne parlerai pas du bruit, lorsque plusieurs centaines d’élèves entrent dans le bâtiment. Même les travaux de groupes socioconstructivistes ne suffiront pas à absorber tout ce débit de paroles. Une réflexion s’impose. Apprendre à travailler dans le silence, apprendre à travailler en groupes***, mais surtout apprendre à travailler efficacement! Ce devrait presque être une discipline scolaire.

 

*www.lematin.ch/societe/droit-enfants-bruit-bientotloi/ story/16178042

** Allusion notamment à l’affiche satirique Sois jeune et tais-toi.

*** Cf. réflexion menée par le Prof. Eric Mazur à Harvard, journal Le Temps du 26 octobre 2012.

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