Les enseignants sont d’abord des enseignantes

Les enseignants sont d’abord des enseignantes

 

Initiée par une récente étude de la HEP de Zurich et relayée par les médias, émerge enfin publiquement la question de la féminisation du monde de l’enseignement. Cet état de fait concerne la plupart des pays occidentaux, du pays (1) et de notre canton. (2) Pour éliminer d’emblée tout soupçon, il ne nous semble pas obligatoirement pertinent de considérer que, respectivement, les femmes ou les hommes porteraient «essentiellement» les qualités requises pour la profession.

Mais au contraire qu’il s’agit d’une interrogation qui questionne d’abord le statut social et la reconnaissance de la profession, le regard posé par celles et ceux qui l’embrassent, et par les usagers ou le public en général. Une interrogation que l’on doit aussi poser sans tabou en regard des conséquences induites en termes de fonctionnement des équipes ou même d’implication dans les associations professionnelles et syndicales. Cette affaire n’est d’ailleurs pas récente. En 2003, déjà, Walo Hutmacher montrait notamment l’existence d’une corrélation entre augmentation de la féminisation et baisse d’attractivité des professions enseignantes (3). C’est dire que les conséquences de la montée en puissance des femmes dans l’enseignement ne peuvent laisser indifférentes les organisations professionnelles. En particulier si ce phénomène intervient au sein d’une évolution sociale générale où croît le nombre de familles monoparentales: un enfant désormais peut se trouver dans un univers où la majorité des adultes qui l’entourent et l’élèvent sont des femmes. S’il serait évidemment hardi de tirer aujourd’hui et sans précaution la moindre conclusion de cet état de fait sur le développement de l’enfant, la question nous semble néanmoins mériter d’être posée. Les causes de cette désaffection nous paraissent multiples, et démultipliées par le fait que la féminisation d’une profession et la diminution de son degré de reconnaissance sociale constituent un couple infernal. Nous en voyons quatre principales: Si la sécurité de l’emploi, élément sans doute plus faible dans notre pays que chez nos voisins, demeure un facteur attractif, le manque de perspectives de carrière et le statut salarial l’emportent, notamment pour les généralistes, dans un monde où domine un modèle où la majorité des cadres sont des hommes. Ensuite, la représentation du métier le positionne de plus en plus vers les responsabilités sociales, traditionnellement considérées comme plus féminines que masculines. Enfin, devenir enseignant autorise de se projeter plus facilement dans un temps professionnel partiel. Encore un facteur qui oriente d’abord les femmes vers l’enseignement. Quant aux conséquences de cette situation, outre le fait qu’une équipe est toujours plus chatoyante et efficace quand y règne la mixité, la féminisation nous apparaît, et notamment en regard de l’augmentation des temps partiels, comme un facteur plutôt péjorant en termes d’organisation du temps de travail librement géré. Les temps partiels par définition dégagent des plages de travail hors présence des élèves généralement difficilement concordantes. Enfin, force est de constater que l’engagement dans le syndicalisme actif est plus difficile quand on mène parallèlement la gestion d’une famille et celle de sa profession. C’est un facteur aggravant, en particulier dans la défense salariale. Et s’il existait, pourtant, au-delà de ces quelques éléments rapidement posés, une réponse plus simple à la désaffection des hommes pour les professions enseignantes? Ce métier requiert de plus en plus de courage. Et si ça leur foutait la trouille, aux hommes, de se coltiner tous les jours avec vingt mômes, leurs malheurs et leurs joies, leurs réussites et leurs échecs? Et si c’était d’abord de cela que manquaient les jeunes hommes? De courage? Cette perspective, si incongrue puisset- elle paraître, est peut-être une piste à creuser.

 

(1) En 2010, 18% des entrées en HEP concernaient des hommes, selon les indicateurs de l’Office fédéral de la statistique (Femmes et hommes dans les hautes écoles suisses – Indicateurs sur les différences entre les sexes).

(2) Selon les indications fournies par le responsable de la formation Cyril Petitpierre, le taux d’hommes dans le Bachelor en enseignement primaire de la HEP-VD est de 15,3% (la moyenne suisse est de 12%). Il est de 43,0% en secondaire I, de 47,9% en secondaire II et de 14,4% en pédagogie spécialisée. Pour l’ensemble des formations de base, on est à 25,0%.

(3) Images, statut social et attractivité des professions enseignantes, Forschungsprogramm, UNIVOX 2003 

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